Dossier Laméca

BOMBA & PLENA DE PORTO-RICO

4. RACINES DANS LE VENT

 

Du temps de César Concepción et Rafael Muñoz la question de la modernisation de la Bomba et la Plena n’était pas la préoccupation des musiciens portoricains jusqu’au jour ou la Orquesta Panamericana du maestro Lito Peña avec Ismael Rivera, d’une part, et Moncho Leña avec Mon Rivera, d’autre part, enregistraient deux Plenas, La sazón de abuela en 1953 et Alo, quién ñama ? en 1955, faisant rentrer de ce fait la Plena au Palladium de New-York.

"La sazón de abuela" (1953) par la Orquesta Panamericana (extrait).

"Alo, Quien Ñama ?" (1955) par Moncho Leña (extrait).

Les différents protagonistes ayant partie liée dans le monde musical et du spectacle d’alors misaient sur les valeurs sûres incarnées par le mambo et le cha cha cha cubains. Il fallut attendre l’avènement de Rafael Cortijo y su Combo formé le 28 janvier 1954, Ismael Rivera intégrant le groupe l’année suivante. De l’avis du musicologue mexicain Rafael Figueroa Hernadez, ce que signifia ce groupe pour le développement tant de la musique que de l’acceptation des nègres ne peut être laissé de côté.

Avec Ismael Rivera prenait enfin corps le concept du sonero portoricain et son entrée sur la scène international en concurrence directe avec la musique cubaine de l’époque qui régnait sans partage.

Dans ces trois formations, la standardisation instrumentale cubaine des années 40 des grands orchestres de mambo finit par toucher Porto-Rico : quatre trompettes, saxos alto, tenor, parfois baryton, piano, contrebasse, tumbadora, paila (timbales), bongó, güiro, maracas et clave, un ou deux chanteurs. La plus grande originalité et attraction fut l’orchestre de Mon Rivera qui ne comptait pas moins de trois trombones.

Le deuxième élément révélateur de l’entrée de ces rythmes dans la "modernité" est le remplacement des barils de Bomba et des panderetas – peut-être trop marqués par les stigmates des bas quartiers et représentant encore los callejones sin salida – par les tumbadoras cubaines, instrument lui aussi débarrassé de ses oripeaux par "trop congo". Rafael Cortijo dès la formation de son Combo original imposa la tumbadora, le bongó et les timbales, ce qui lui fut implicitement reproché.

De ce fait, le temps passant, les barils de Bomba et les panderetas retrouvaient leur rôle d’instruments de "folklore". Mais rappelons l’émergence en 1974 du groupe Los Pleneros del Quinto Olivo et son rôle dans la régénérescence de la Plena.

Il est notoire de constater que les deux musiciens portoricains les plus importants, Tito Puente et Pablo Tito Rodriguez, basés à New-York n’ont fait guère cas de cette musique du Porto-Rico nègre. Tito Puente, en plus de 108 albums, enregistrera trois ou quatre Bomba dont une avec La Lupe Victoria. Tito Rodriguez n’en laisse pas trace.

La modernisation de ces deux rythmes devait avoir lieu en terre boricua avant l’arrivée du rouleau compresseur nommé salsa. Pour ce faire et comme pour le guaguanco afro-cubain, un certain nombre de musiciens les ouvraient à l’instrumentation mélodique moderne. Ils y ont adapté des lignes mélodiques d’accompagnement surtout au piano. Des arrangeurs comme Eddie Palmieri et Jorge Millet y ont introduit de savantes orchestrations et la musique latine a parfois et avec bonheur laissé des espaces comme ponts musicaux sur quatre ou huit mesures de Bomba dans l’exécution de certains morceaux : Que gente averigua (1976), A la verdegue (1970), Ola de agua (1957), Compay Sapo (1970), Bomba del corazon (1963), La sazón de abuela (1953), Alo ! quien ñama ? (1955), Se escapó un león (1968) font partie des centaines de Bomba et Plena issues du milieu populaire portées en studio.

"Que gente averigua" (1976) par Mon Rivera (extrait).

"Compay Sapo" (1970) par Cortijo y Kako (extrait).

"Bomba del corazon" (1963) par Eddie Palmieri (extrait).

"La sazón de abuela" (1953) par la Orquesta Panamericana (extrait).

"Alo, Quien Ñama ?" (1955) par Moncho Leña (extrait).

Bomba del Corazon de Eddie Palmieri sort des sentiers tout tracés de Loíza ; le piano du jeune maestro "new-ricain" et son accompagnement montuno, supporté par le trombone de Barry Rogers, retenant la leçon de ceux de Joe Cotto, donnèrent à ce thème joué à New-York en hommage à borinquen, une atmosphère particulière.

La sazon de abuela du maestro Lito Peña avec le jeune sonero Ismael Rivera agé de 22 ans, marquait un "break point" sur le chemin de la modernité, Maelo se la comió !

D’autres thèmes ont des saveurs de notre monde tropical : plena-mambo, calypso-plena, plena-cumbia.

Cuando el negro se alzó de Rafael Cepeda, repris en studio avec des orchestrations de Jesus Cepeda en big band, préfigurait William Cepeda tandis que Modesto Cepeda, dans plusieurs réalisations, continuait de suivre avec les plus grand respect et ferveur cet art musical afro-boricua, sur les traces de Don Rafael Cepeda Atiles, El Roble Mayor.

Alegria Bomba Es ! ! !

"Alegria Bomba Es" (1955) par Cortijo y Kako (extrait).

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SOMMAIRE
1. Musique
2. Instruments
3. Musiciens
4. Racines dans le vent
Illustrations musicales

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Par Alex E. Petro

© Médiathèque Caraïbe / Conseil Général de la Guadeloupe, 2001